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ambroise est arrêté.

laissèrent ces protestants libres de continuer leur route. Mais leur infortune n’était que retardée ; ils furent guettés, suivis, et, deux jours après, arrêtés en Dauphiné avec leurs guides. Pour le coup, Ambroise n’ignorait pas les Déclarations du roi et la peine qui l’attendait ; aussi, dès ce moment se regarda-t-il comme destiné à finir ses jours sur les galères ; et il se résigna à son sort, comme un homme qui n’a aucun espoir de le voir changer.

Le lendemain, on le conduisit avec ses compagnons dans l’endroit de la route où ils devaient joindre la chaîne. On leur mit au cou des chaînes du poids de quarante ou cinquante livres ; on les attacha avec des voleurs ; on ne leur donna qu’une nourriture grossière, et en très petite quantité ; et quand ils tombaient de lassitude, on les faisait relever à grands coups de bâtons. Au rendez-vous de la chaîne, ils trouvèrent une foule de gens de considération, négociants, avocats, gentilshommes, qui avaient été arrêtés comme eux, et dont plusieurs étaient vénérables par leur âge, leurs infirmités et leurs longs services[1]. Ils arrivèrent ainsi à Valence.

  1. Je pourrais produire des listes de trois mille personnes arrêtées dans les provinces depuis 1744, à l’occasion de leurs assemblées religieuses, et, en particulier, dans le haut et bas Languedoc, les Cévennes, le Vivarais, le Dauphiné, la Provence, le comté de Foix, le Poitou et la Saintonge. Sans parler du commun peuple, on y compterait plus de six cents gentilshommes, avocats, médecins, bons bourgeois et riches négociants, qui ont essuyé tout ce qu’a d’accablant une cap-