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JUSTINE.

rent pas un mot ; mais il était aisé de voir qu’elles désiraient vivement entendre la suite de ces singulières confessions. Guibard reprit donc :

Je sortis de chez le baron en disant aux domestiques que j’avais trouvé leur maître bien malade ; que je le croyais atteint d’une fièvre cérébrale, et qu’il était nécessaire de le mettre au lit et de le garder à vue, attendu qu’il parlait sans cesse de se tuer. Ils se hâtèrent d’aller secourir le baron, et ils le trouvèrent comme je l’avais laissé, c’est-à-dire étendu sur le ventre ; la garde de l’épée appuyée sur le parquet, et la pointe sortant par le milieu du dos. Le bruit se répandit aussitôt que le baron de la Guibardière s’était suicidé ; j’accourus alors ; je fis faire au défunt de somptueuses funérailles, et je me trouvai possesseur de vingt mille francs de rente. Je mourais d’envie dès lors de jeter le froc aux orties ; mais cela, loin de servir mes