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TRAITÉ ÉLÉMENTAIRE

avons de chaque position de la main, de la direction et de la grandeur de chaque mouvement qu’elle fait. Tandis qu’une main passe sur l’autre, elle étend en quelque sorte, sur la surface de celle-ci, la couleur dont l’impression est dans l’œil ; elle circonscrit cette couleur entre ses limites, et fait naître dans l’ame la représentation d’un corps figuré de telle manière. Lors qu’ensuite nous touchons différens objets, la main dirige l’œil sur les diverses parties de chacun d’eux, et lui en rend sensibles l’arrangement et les positions respectives ; elle agit sans cesse, à l’égard de l’œil, par l’intermède des rayons de la lumière, comme si elle tenoit une des extrémités d’un bâton qui aboutiroit au fond de l’œil par l’autre extrémité, et qu’elle conduisît successivement ce bâton sur tous les points de l’objet. Elle semble avertir l’œil que le point qu’elle touche est l’extrémité du rayon qui le frappe. Elle parcourt ainsi toute la surface de l’objet ; elle semble en prononcer la véritable forme. Tantôt courbée uniformément sur la surface d’un globe dont elle suit le contour dans tous les sens, elle marque la distinction de la lumière et des ombres, elle donne de la rondeur et du relief à ce que l’œil aperçoit. Tantôt obligée de varier sa propre figure, tandis qu’elle se moule alternativement sur les faces et sur les arêtes d’un corps anguleux, elle fait ressortir les diverses positions et l’assortiment des plans qui en composent la surface.

Dès qu’une fois les yeux sont instruits, alors l’expérience qu’ils ont acquise les met dans le cas de se passer des secours du tact ; et la seule présence des objets détermine le retour des mêmes sensations, à l’occasion