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TRAITÉ ÉLÉMENTAIRE

de se réconcilier avec elle. Effectivement, il étoit dur d’être obligé d’avouer qu’il ne tenoit qu’à la présence du fluide électrique que les molécules de tous les corps solides ne parussent exercer les unes sur les autres une action directement opposée à la gravitation universelle. C’étoit donner à la théorie un adversaire bien puissant et bien redoutable. On pare à cet inconvénient, en concevant le fluide électrique comme formé par la réunion de deux fluides, dont l’un fait la fonction qu’Æpinus attribuoit aux molécules des corps. Il répugne beaucoup moins d’admettre une répulsion à distance entre les molécules de deux fluides particuliers qui, comme tous les autres, se repoussent déjà au contact, qu’entre celles de tous les corps solides de la nature. Les physiciens qui expliquoient tout avec un seul fluide, avoient commencé eux-mêmes à croire que ses molécules se repoussoient aussi, à distance, d’une surface à l’autre de la bouteille de Leyde ; et comme ce que nous appelons action à distance n’est proprement qu’un fait sur lequel nous appuyons une théorie, sans rechercher la cause qui fournit le point d’appui, il nous suffit que la manière dont nous concevons ce fait puisse s’adapter à notre physique, et que toutes nos hypothèses se lient dans notre esprit, comme les véritables causes, dont elles nous servent à représenter les résultats, sont liées dans les desseins de la Sagesse suprême. Enfin, l’hypothèse des deux fluides est la seule, jusqu’ici, qui ait, relativement aux deux espèces d’électricité, l’avantage d’établir une parité exacte entre les actions qui produisent des phénomènes que l’observation nous offre sous des traits si ressemblans, et de ramener tout à des