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DE PHYSIQUE.

toutes les quintes se trouveroient également altérées, attendu qu’il n’y avoit pas de raison pour altérer l’une plutôt que l’autre. On a trouvé que dans ce système les tierces devenoient dures et choquantes, et l’on a généralement adopté la méthode à laquelle Rameau lui-même avoit d’abord donné la préférence, et qu’il a ensuite abandonnée. Dans les instrumens accordés par cette méthode, les quintes données par les tons naturels de la gamme conservent presque entièrement leur harmonie ; les différences les plus sensibles portent sur les demi-tons intermédiaires ; les musiciens ont pris dans la série des quintes, certaines notes qui leur servent à vérifier de temps en temps leur opération, d’après la justesse de quelqu’autre accord, tel que celui de tierce, que chacune de ces notes doit faire avec une des notes déjà accordées. Il résulte de là une grande diversité dans les altérations qu’ont subies les intervalles de quinte et de tierce qui partagent la série des différens sons, et l’on a même regardé cette diversité comme un avantage ; car, suivant que l’on choisit tel son de préférence pour note tonique, c’est-à-dire, pour celle à laquelle se rapportent toutes les autres, en sorte que la modulation repose, pour ainsi dire, sur cette note comme sur une base, les quintes et les tierces que parcourt le chant ont quelque chose de sombre, qui est propre à inspirer la tristesse, ou je ne sais quoi d’exalté qui excite la joie. Ainsi, la modulation emprunte de la seule manière dont les intervalles qu’elle emploie ont été altérés, une teinte du caractère qu’elle porte par elle-même ; et ce qu’on auroit été tenté de regarder comme un défaut, devient, pour