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fort destiné à prévenir les incursions des Iroquois fut élevé au confluent de la rivière de Sorel. Enfin, par les soins de M. de Maisonneuve, gentilhomme champenois, agissant pour le compte d’une association dévote dont M. Olier, le fondateur de Saint-Sulpice, était l’âme, Montréal commença à s’élever dans l’île de ce nom. Une cinquantaine d’hommes et quelques femmes y furent installés (1642) et mis sous la protection de la sainte Vierge. La nouvelle ville devait s’appeler Ville-Marie ; mais le nom de Montréal (Mont-Royal) prévalut. Le premier soin des habitants fut de bâtir, avec des pieux et des palissades, un petit fort en terre dans l’endroit même que Champlain avait désigné trente années auparavant.

Malheureusement, ce beau feu de colonisation se ralentit vite. La Compagnie des Cent-Associés, ne trouvant pas sans doute dans le commerce des pelleteries et dans l’exploitation du sol les ressources qu’elle avait espérées, se désintéressait de la colonie. Les immigrants, à qui l’on demandait un brevet de « bon catholicisme », se faisaient de plus en plus rares ; si bien qu’en 1642, la population européenne ne dépassait pas encore 200 âmes ! On peut voir ici quelle faute avait commise Richelieu en fermant aux Huguenots les portes de la Nouvelle-France. Eux seuls, — car les persécutions qui préparaient déjà la révocation de l’édit de Nantes leur rendaient l’émigration désirable — eussent pu peupler en grand nombre la Nouvelle-France, s’ils y avaient trouvé, selon les vues d’Henri IV, une nouvelle patrie plus hospitalière que l’ancienne. Et c’était eux qu’on excluait, dans le même temps où les colonies puritaines de la Nouvelle-Angleterre se