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étouffée dans son berceau, et l’on ne sauroit trop admirer le courage de M. de Champlain, qui ne pouvoit faire un pas sans rencontrer de nouveaux obstacles, qui consumoit ses forces sans songer à se procurer un avantage réel, et qui ne renonçoit pas à une entreprise pour laquelle il avoit continuellement à essuyer les caprices des uns et la contradiction des autres. »

Il faut, en effet, savoir d’autant plus de gré à Champlain de sa persévérance que les motifs de découragement étaient plus nombreux. M. de Mons avait perdu le peu de crédit qu’il avait gardé à la cour, en dépit du P. Cotton, tant qu’avait vécu le « Béarnais ». Les jésuites intriguaient auprès de la reine-mère, sous le couvert de Mme de Guercheville, (dont nous avons déjà vu le rôle en Acadie), pour se faire envoyer comme missionnaires, c’est-à-dire comme maîtres, dans la colonie. Fatigué de lutter, M. de Mons conseilla à Champlain, dans une entrevue qu’ils eurent à Pons en Saintonge, de chercher un autre protecteur, et lui abandonna le soin de toute l’entreprise. Champlain, en effet, — et quoiqu’il vînt d’épouser (au commencement de 1611) une jeune fille protestante, Hélène Boulay, fille d’un secrétaire de la chambre du roi, — devait à sa profession de catholicisme d’être mieux en cour, étant moins suspect aux jésuites. Il parvint donc à décider quelques grands seigneurs à prendre le Canada sous leur patronage. Ce fut d’abord le comte de Soissons qui reçut le titre de « lieutenant général au pays de la Nouvelle-France » ; puis, à la mort du comte, survenue peu de temps après, ce fut le prince de Condé, nommé « vice-roi » par la reine-régente et qui maintint Champlain