Page:Réveillaud - Histoire du Canada et des canadiens français, de la découverte jusqu'à nos jours, 1884.djvu/55

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Jésuites au nouvel établissement qu’ils avaient résolu de fonder de l’autre côté de la baie Française. La reine-mère, qui protégeait aussi ces « bons pères » voulut contribuer à l’achat des armes et des munitions. Sur ce vaisseau, placé sous le commandement d’un sieur La Saussaye, partirent, le 12 mars 1613, les PP. Quentin et Du Thet. Ils rallièrent, en passant à Port-Royal, les PP. Biard et Massé qui se trouvaient là, et tous ensemble, suivis de leurs gens, firent voile vers l’île des Monts-Déserts, à l’embouchure de la rivière Pentagoët. Les Jésuites prirent possession de ce lieu, qu’ils nommèrent Saint-Sauveur, en y dressant une grande croix, puis ils s’occupèrent d’y faire construire un retranchement et des logements pour les hommes qui devaient y passer l’hiver. Tout alla bien pour quelque temps, et l’on se flattait déjà d’un succès qui effacerait jusqu’au nom de la colonie rivale, quand survint un orage qui abattit du même coup et la nouvelle colonie de Saint-Sauveur et les espérances des pères jésuites.

Les Anglais avaient, en 1606, fondé leur première colonie américaine sur les côtes de Virginie. En l’année 1613, où nous sommes parvenus, leur établissement ne comptait encore que 400 âmes ; mais déjà le voisinage des Français, quoique ceux-ci fussent les premiers en date, irritait la jalousie britannique, et, tandis que la France revendiquait tout le territoire au nord du 40e degré (latitude de Philadelphie), les Anglais réclamaient, en vertu d’une prétendue charte de Jacques Ier, l’attribution de tout le pays situé au-dessous du 45e degré de latitude. L’île des Monts-Déserts se trouvant dans la zône contestée, un certain Argall, capitaine virginien, se montra inopinément à la tête d’une petite