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rité, hors la seule province de Québec, ce n’est pas à une minorité si nombreuse, si importante et intellectuellement si bien armée, que la majorité anglo-saxonne (d’ailleurs divisée contre elle-même par une foule de causes politiques et religieuses) pourrait jamais retirer ses droits acquis, sans risquer, par le seul essai, de disloquer la Confédération. Personne d’ailleurs n’y songe du côté des Anglo-Canadiens et, moins que personne, le gouverneur nommé par la couronne anglaise, qui sent fort bien que l’existence de l’élément français au Canada est la meilleure garantie qu’a l’Angleterre contre l’absorption du « Dominion » dans la puissante République voisine. Cette absorption serait probablement depuis longtemps une chose faite si le Canada n’avait été peuplé que d’Anglais, d’Écossais ou d’Irlandais, et si les Franco-Canadiens n’avaient, au temps de la guerre de l’Indépendance et depuis, lors de la guerre de 1812, montré par des actes leur répugnance à l’annexion.

L’annexion du « Dominion » aux États-Unis est pourtant dans l’ordre des choses possibles à un moment donné[1]. La majorité des Canadiens français, surtout dans les rangs des conservateurs catholiques, paraît considérer cette éventualité comme un malheur. La plupart des historiens et publicistes qui ont écrit sur le Canada se sont rangés à ce point de vue. « L’union actuelle, écrit l’un d’eux, est cimentée par un mutuel intérêt. Sans la sympathie des Franco-Cana-

  1. Voir dans la Revue des Deux-Mondes, livraison du 1er  avril 1879, un article de M. de Varigny : « La doctrine de Monroe et le Canada. »