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sur la rive nord du Saint-Laurent, s’étendent, sur une longueur de plusieurs lieues, la « côte de Beauport » et la «  « côte de Beaupré » semées de riants villages, dont le principal, Château-Richer, est aujourd’hui le chef-lieu du comté de Montmorency. Mais plus nous avançons de ce côté, plus la zone de terre cultivable se resserre entre le Saint-Laurent et les monts Laurentides, dont les pentes abruptes et stériles se rapprochent toujours plus du rivage. « La rive nord du Saint-Laurent, dans toute la longueur du comté de Charlevoix, est tout ce qu’on peut imaginer de plus inhumain. Rochers, gorges, chemins empierrés, se précipitant et rebondissant, voilà cette rive, de la baie Saint-Paul à Tadoussac. On met une journée à faire six lieues, et l’on saute constamment : cela vaut le mal de mer[1]. » Notre-Dame des Éboulements, Saint-Irénée et la Malbaie sont les principales paroisses de ce territoire.

En sortant de cette contrée sauvage, la vallée du Saguenay et du lac Saint-Jean semble presque un paradis. Et cependant les abords en sont eux-mêmes singulièrement âpres et « horrifiques ». « La rivière Saguenay, dit un auteur canadien, est un gouffre, profond parfois de mille pieds, taillé, en plein granit, au sein d’énormes entassements de montagnes, par un terrible cataclysme qui doit remonter à des milliers d’années… Il y a comme du délire dans cette création. Les montagnes paraissent avoir été jetées là au hasard, comme dans une épouvantable mêlée, où les combattants sont restés debout, foudroyés sur place[2] ». Mais, quand on a franchi la barrière de cette nature tourmentée et

  1. Arthur Buies. Chroniques.
  2. Arthur Buies. Le Saguenay et la vallée du lac Saint-Jean.