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commissaires chargés de recueillir toutes les informations possibles sur l’état de la province et sur les moyens de remédier aux maux du pays.

Ces maux étaient en grand nombre. Les justiciables se plaignaient d’avoir des juges, mais pas de justice, les juges appliquant, selon leur caprice ou l’occasion, tantôt les lois françaises, tantôt les lois anglaises, tantôt « l’équité naturelle ». Les marchands, qui pour la plupart étaient anglais (il eût été en effet bien difficile aux Canadiens français, sans relations avec le dehors, d’empêcher le commerce de tomber entre des mains anglaises) réclamaient l’introduction des lois anglaises dans toutes les matières de statut personnel, de négoce et de police. Les cultivateurs d’autre part, du moins certains d’entre eux, se prononçaient contre le système des tenures féodales, sans bien savoir encore par quoi le remplacer. L’emploi à faire des biens des Jésuites, dont le gouvernement s’était emparé en 1766, fournissait aussi matière à d’amples discussions.

L’écho de ces discussions et de ces plaintes commençait à parvenir régulièrement en Angleterre, où l’opinion et les journaux s’en saisissaient. Une agitation pacifique fut organisée pour réclamer l’introduction en Canada du régime représentatif, et une pétition signée par les habitants tant anglais que français fut adressée à la couronne pour demander une constitution et un parlement local. La grande intelligence de Fox avait parfaitement compris la légitimité de ces exigences venant d’un peuple qui croissait tous les jours en nombre et en force :

« Dans un pays, disait-il, où l’abondance des moyens de subsistance accroîtra rapidement la population, où le bas prix des terres