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m’a fallu, écrivait le gouverneur au ministère, choisir des magistrats et prendre des jurés parmi quatre cent cinquante commerçants, artisans et fermiers, méprisables tout d’abord par leur ignorance. Ils haïssent la noblesse canadienne à cause de sa naissance, et parce qu’elle a des titres à leur respect ; ils détestent les autres habitants, parce qu’ils les voient soustraits à l’oppression dont ils les avaient menacés. »

Cet élément peu recommandable réussit cependant à force de se démener, à provoquer le rappel du gouverneur Murray en Angleterre (1765) et son remplacement par le brigadier général Carleton. Murray paya ainsi de la perte de son emploi le crime, irréparable alors, d’avoir montré quelque sympathie et quelque équité pour la race vaincue[1].


L’Angleterre envoya au Canada, en qualité de lieutenant-gouverneur, et pour remplacer Murray, le général Carleton ; un nouveau juge en chef, M. Hey, et un nouveau procureur général, M. Mazères, fils d’un refugié huguenot, l’accompagnaient (1766). Cette nouvelle administration ne changea pas les dispositions des Canadiens qui persistèrent dans leur attitude de protestation et dans leur calme résistance à l’arbitraire qui

  1. Murray eut à réprimer, pendant son administration, un soulèvement des Indiens du pays d’En-Haut, rassemblés sous la conduite d’un chef Outaouais, nommé Pontiac.

    C’est aussi sous l’administration de Murray que parut (21 juin 1764) le premier journal canadien de langue française, la Gazette de Québec. Mais ce journal dut longtemps se contenter de noter, sans les commenter, les nouvelles du Canada et de l’étranger, et l’on y chercherait vainement un reflet de l’opinion au Canada au dernier siècle.