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Il ne pouvait admettre que les rois d’Espagne et de Portugal s’adjugeassent cette immense étendue de territoire sans lui en laisser miette. « Je voudrais bien voir, disait-il, l’article du testament d’Adam qui leur lègue ce vaste héritage ! Qu’il souffrent au moins que j’y aie ma part, comme leur frère ! »

Philippe de Chabot était alors grand amiral de France. C’est sur une commission signée de lui que Jacques Cartier, de Saint-Malo, brave et aventureux marin comme tant d’autres enfants de sa ville natale, entreprit ce voyage de reconnaissance qui devait attacher pour jamais son nom à la découverte du golfe et du bassin du Saint-Laurent.

La munificence du ministre ne lui avait donné pour cette première expédition que deux bâtiments de soixante tonneaux chacun, avec 61 hommes d’équipage. Les deux voiliers quittèrent Saint-Malo au printemps de 1534, cinglèrent en droite ligne vers l’occident, s’engagèrent dans le détroit de Belle-Ile qu’on avait pris jusque-là pour une simple baie ; pénétrèrent dans le golfe immense du Saint-Laurent, reconnurent Anticosti et quelques autres îles du golfe ; puis, ayant contourné, sur presque tout son périmètre, l’ile de Terre-Neuve et mouillé quelque temps dans la « baie des Chaleurs », qui reçut alors le nom qu’elle a gardé depuis, ils remirent le cap sur Saint-Malo où ils rentrèrent le 5 septembre 1534.

Cartier remit à la voile, le 19 mai de l’année suivante, avec un armement plus considérable. Il avait cette fois trois navires, « sçavoir la Grand Hermine du port, environ cent à six vingt tonneaulx, ou estoit le cappitaine général, et pour maistre Thomas Frosmont,