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Les capitaines de sauvages, en effet, quels que fussent leurs instincts d’indépendance, ne pensèrent jamais à manquer à l’allégeance qu’ils devaient à la couronne de France et vécurent toujours en bonne intelligence avec les gouverneurs de l’Acadie. Ceux-ci se succédaient depuis la mort de M. de Grandfontaine assez rapidement, sans apporter de nouvelles ressources à la colonie et sans réussir même à la protéger contre les attaques des « flibustiers » qui, en 1679, dévastèrent les habitations de la côte.

Les uns après les autres, tous ces gouverneurs — MM. de Chambly, de Soulanges, de La Vallière, Perrot (l’ancien gouverneur de Montréal) et de Menneval — harcelaient le ministère de demandes et de plaintes sans jamais réussir à secouer l’inertie du ministre.

Délaissée comme l’était l’Acadie, il n’est pas surprenant qu’elle apparût aux colonies anglaises comme une proie facile à saisir. Celles-ci n’avaient cessé de se développer depuis leur fondation, et tandis qu’à l’époque où nous sommes arrivés, la population de la Nouvelle-France (Canada et Acadie réunis) atteignait à peine 13,000 âmes (dont 1,000 environ pour l’Acadie), celle des colonies anglaises dépassait déjà les deux cent mille.

On eût pu suppléer sans doute à cette disproportion numérique, en entretenant dans nos colonies des forces militaires considérables, mais la France, toujours absorbée par sa politique trop exclusivement continentale, n’envoyait en Amérique que de faibles détachements ; c’est à peine si, à la fin du XVIIe siècle, il se trouvait 500 soldats réguliers, tant au Canada qu’en Acadie[1].

  1. Rameau.