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qu’elle a-été bién-longtemps abſente ! mais on dit que les chagrins y-ont-eu autant de part que les affaires, Oh ! que n’a-t-il mes ïeus !… Je ſens en-m’occupant d’elle, un feu dans ma poitrine, une joie, un contentement, avec des mouvemens… Quel plaisir de la voir tous les jours ! d’être à-portée d’executer quelques-uns de ſes ordres ! plûs la chose ſera penible, plûs j’y-trouverai de delices. Et cela me-fait-comprendre comment nos Premiers-Parens ſ’occupaient avec plaisir-ét-ſans-peine dans le Paradis-terreſtre ; Adam penſait pour Eve, Eve pour Adam, comme je penſe pour elle, ét ils travaillaient l’un pour l’autre… Mais où en-étais-je ?

Tiénnette aidait m.me Parangon à ſe-deshabiller ; ét moi je demeurais-là… (Je ne ſais pas enverité, comme j’ai-été-capable de cette indiſcretion !) — Eh bién, ma Tiénnette, a-t-elle dit, ſans paraître ſonger à moi, vous m’avez-tant-desirée ! me voici-. Tiénnette lui a-baisé la main, ſans repondre un mot ; et j’ai-vu rouler des larmes dans ſes ïeus. (C’eſt qu’elle a des remords ; elle n’eſt-pas-encore-accoutumée au vice, vois-tu : ah ! elle en-doit bién-avoir !) — Ma pauvre Tiénnette (a-t-elle-continué)… j’y-ſuis inſenſible à-present… Je ne l’aurais-pourtant-pas-cru… Je ne devais pas… Si j’en-ſuis-fâchée, ce n’eſt qu’à-cause de Celle-… Tiénnette a-ſoupiré ; ſes regards ſe-ſont-tournés vers moi. m.me Parangon paraiſſait plongée dans une rêverie