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peine à-gâgner Edmée ; elle ne ſe rendait pas même à ce que lui disait ſa Sœur, groſſe rejouie fort-appetiſſante, ét qui ne ſe-fesait pas autrement preſſer. De ma vie je n’ai-fait un plus-agreable repas. Je me ſuis-aperçu que trop de façonage deplaisait à la gentille Edmée ; j’ai-menagé ſa petite humeur, ou, comme on dirait ici, ſa chatouilleuse delicateſſe, en-partageant mes attentions à toutes ſes Compagnes : mais ſans affectation, j’étudiais dans ſes ïeus, pour deviner ce qui lui fesait-plaisir, ét je la ſervais avec une eſpèce de nonchalance ét de diſtraction ; ce qui a-fait un bon-effet ; car elle ſ’eſt-unpeu-apprivoisée, quand elle a-cru que je n’avais pas de preference pour elle. Après le goûter, Tiénnette ét m.r Loiseau les ont-regalées d’une bourguignote, danſe vive ét legère, qu’on ne connait guère à Au★★, ni chés nous, mais qui eſt-familière dans le Morvant. Mafoi, les contredanſes de la Ville, les menuets, les paſſepiéds, les matelotes, les allemandes ne ſont rién auprès de cela, quand on danſe comme Tiénnette ét Loiseau. Mais nous-nous en-ſommes-repentis ! la Foule nous a-entourés ; m.r Parangon ét m.lle Manon font-venus comme les autres : cette Dernière m’a-fait-ſigne, en-m’apercevant ; ſi-bién que je n’ai-pu me-diſpenſer de m’approcher d’elle, ét j’ai-obſervé que la jeune Edmée me-ſuivait des ïeus : c’eſt ce qui a-fait que je me ſuis-tenu ſur mes gardes, ét dans