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elle (ſi elle eſt-coupable ; car on peut ſe-tromper), devrait craindre qu’on ne lût dans ſes ïeus ce qu’elle a dans l’âme, ét de voir dans ceux des Autres les reproches qu’elle merite : aumoins voila ce que j’apprehenderais à ſa place ! Mais baſt ! c’eſt le plus-loin de ſa penſée ! Ce ne ſont que cajoleries ét prevenances… Hum ! la Scelerate ! (ſi c’était elle) : il faut avoir de l’honneur pour y-resiſter ! encore à tout-moment ne ſait-on oû l’on en-eſt ! Je me ſais bon-gré de t’écrire tout ; cela me retiéndrait dans la ſuite, ſi jamais j’étais-tenté d’être-aſſés-lâche pour aimer une Fille qui n’eſt pas ſage (ſi c’était elle, tu entens bién) ? Elle viént de me dire tout-à-l’heure que m.r Parangon la mène tantôt à un apport[1], dans un hameau à une lieue de la Ville, nommé Saintloup-en-vaux, où tout le monde ſe-rend aujourd’hui pour ſe-divertir ; elle a-ajouté, que je pourrais m’y-trouver, les chercher ét les aborder, comme ſi je les rencontrais par-hasard. Mais. je me propose bién de n’en-rién-faire. J’irai pourtant à l’apport, Tiénnette m’a-prié de l’y-mener, afin que m.r Loiseau puiſſe ſ’y-trouver, ſans quelle manque à la reserve qu’elle l’eſt-preſcrite. Nous alons partir ; j’acheverai ma Lettre ce ſoir.

10 heures
du ſoir.
Oh ! que voici bién des choses à t’apprendre, mon Pierre ! Nous venons de l’apport :

  1. On nomme ainſi de petites Foires qui ſe tiénnent le beaudimanche des fêtes des Paroiſſes-de-village ; on va ſ’y-regaler, danſer, &c.