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ſuperiorité de la fortune ; ils ſe dedommagent alors, avec usure, de toutes les baſſeſſes où ils ſe-contraignent devant leurs Egales.

Je trouve du plaisir à m’entretenir avec Tiénnette : cette Jeunefille eſt la douceur même ; elle a du bon-ſens, ét beaucoup de vertu. On m’a-dit qu’elle en-avait-eu-besoin, pour resiſter aux attaques de mon Maître . C’eſt m.r Loiseau, Jeunehomme de ſon pays, qui m’a-donné ces lumières. Je ne pouvais en-croire mes oreilles. Un Homme marié, avec une Femme ſi-charmante ! (car je me rappelle bién de l’avoir-entrevue à V★★★, quand nous avons-été chés m.r ſon Père, pour me presenter, nos chèrs Parens ét moi), oublier ainſi ſes devoirs ; cela me paſſe ! Auſſi (ét je te le dis ſous le ſecret) il eſt Francmaſſon ; de ces Gens qui voient le Diable dans leurs Aſſemblées, ſous la forme d’un gros Taureau noir[1]. Mais l’on en-ſait bién-d’autres ici !… Pour revenir à Tiénnette, cette Jeunefille eſt modeſte ; elle n’aime pas qu’on la recherche ; je ſuis le Seul de la maison dont elle voie l’aſſiduité avec plaisir, parceque je ne dis rién de libre, que je me plais beaucoup dans la compagnie de ſon Pays m.r Loiseau, ét que lorſque nous ſommes enſemble, j’ai la complaisance de lire haut pendant qu’elle fait ſon ouvrage. Elle eſt fort-ſenſible : hièr après ſouper, je

  1. Prejugé populaire, dans les Campagnes, occasionné par le pretendu ſecret des Francsmaſſons.