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nos Frères ; les Filles-à-l’année ou au-jour à-côté de nos Sœurs, ét toutes ſervent ſans diſtinction ; ce-ſont des Aides, non pas des Servantes : notre bon Père preside au-haut de la table, ét cet honoré Vieillard a le plaisir de voir ſes huit Filles ét ſes cinq Garſons (car hélas ! il ne faut plus me compter) les plus-modeſtes ét les plus-actifs de la tablée : Il voit les Etrangérs le regarder avec la même tendreſſe que le regardent ſes Enfans-propres, ét écouter avec attention ét reſpect, ſes diſcours inſtructifs ét amusans. Notre bonne Mère, pendant ce temps-là examine ſi rién ne mangue, ét ſi rout le monde eſt-content ; ét quand elle a-tout-vu, ét tout-rangé, elle écoute auſſi, ét plus attentivement que Perſone.

Etpuis ſi tu voyais encore comme on fai ici aux Paysans qui viénnent chaque-ſemaine apporter les denrées neceſſaires ! Ils y-ſont-traités avec un mepris que je ne conçois pas, ét qui me parait marquer de la bêtise dans les Gens-de-la-Ville ; car ces pauvres Villageois les deteſtent, ét ils ſe-vengent de leurs mauvaises-façons, en-vendant mauvais le-plus-chèr qu’ils peuvent, ét en-trompant de toute manière Ceux qui les meprisent : ét je crois que c’eſt un bonheur qu’ils aient cette petite compenſſation-là, car ſans elle, je ſuis-quasi-ſûr qu’ils ne reviéndraient plus fournir le marché.

Bién-loin-donc, de rechercher les Gens