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pations baſſes les plus-beaus jours de ma vie ? Car ce n’eſt pas ici comme chés-nous, mon chér Pierrot, où tout le monde met la main à l’œuvre ; ma Mère, mes Sœurs font les mêmes choses que les Filles-de-journée ; mon Père ét nous, ét les Garſons-de-charrue, c’eſt tout un : Mais ici, il y-a des choses que les Maîtres ne font jamais, qui ſont comme honteuses, ét qui repugnent à toute Perſone honnête, par l’opinion qu’en-donnent Ceux qui les exigent des Autres. Et on me fait-faire de ces choses-là, quoique je ſois Élève, ét non Domeſtiq ; parcegu’on voit que je ſuis-doux ét bonaſſe, ét non pas fièr comme mes Camarades : Je mange à la cuisine ; on m’a-dit que c’était juſqu’à-temps que j’aie-perdu mon air villageois, ét que je ſois-mieux-habillé. Mais qu’a-t-il donc de ſi-mauvals, cet air-de-village ? ét ne ſuis-je-pas-habillé à-tous les jours, comme je l’étais chés nous les dimanches ! C’eſt que ces habits-là ne ſont-pas-faits à-la-mode. Outre leurs vices, ces Gens-ci ont le defaut de n’eſtimer qu’eux ét ce qui leur reſſemble ; c’eſt le moyén de ne ſe-jamais-corriger. Pour moi, je ſuis timide, gaûche, comme ils disent ; mes Camarades ſont-effrontés, eux, ét on trouve ça bien ici ; on y-loue ce qu’on blâme chés nous, ét l’on y-blâme ce que tout Honnête-homme a-toujours-loué… Mais c’eſt peutêtre un bién pour moi, qu’ils