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Ç’a-toujours-été mon fidel ami, que ce reſpectable Père.

Mes vœus étaient donc nuls : mais ſachant à quî j’avais-affaire, je gardai le filence, ét ne voulus pas faire de ſcandale : ma naiſſance en-avait-deja-aſſés-causé.

Je paſſai neuf-ans chés les Cordeliers, tant à Troies qu’ici. Lorſque j’eus-atteint vingt-cinq-ans, mon Père-oncle, qui vivait encore, me força de recevoir les ordres, ét trouva des Gens qui le ſecondèrent. Je perdis alors tout eſpoir. En-effet, que m’importait d’être moine ou prêtre-ſeculier, dès que je ne pouvais plus entrer dans le mariage ét perpetuer mon nom ? Cependant aujourd’hui, je ſonge à faire-caſſer mes vœus, ét je ne crais pas que Perſone ſ’y-oppose, mon Père érant aujourd’nui le ſeul reſte de ma Famille ; car mon Pêre-oncle eſt-mort huit jours après mon ordination. Ma Sœur, qui avait-été-richement-mariée, m’aimait tendrement, à-cause de notre Mère : inſtruite de la non-validité de mes vœus, elle avait-été juſqu’à ſe-jeter aux genous de ſon Père, afin qu’il n’exigeât pas que je prîſſe les ordres : mais le vindicatif D’Arras demeura inflexible,

Dès qu’il fut-mort, ma Sœur me fit une penfion ſi-forte, que je la priai de la moderer : elle partagea le revenu également, ét m’en-fit tenir la moitié. J’ai-tresorisé par ce moyén, ét j’ai une ſomme conſiderable à-placer : tu ſeras mon prête-nom.