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Oh ! je l’abhorre plûſ-que tout Homme au monde… Je ne vous aurais-pas-parlé de Ça, ſi je n’eſperais que cette raison vous engajera, ma trés-chère Dame, à me-demander plus-vîte. Vrai, ce vilain Amoureus me-paraît un de ces Satyres, dont j’ai-lu l’hiſtoire chés vous, au-bas d’une Eſtampe. Mais je laiſſe ce ſujet desagreable, pour continuer à repondre à vos aimables queſtions-de-bouche.

Vous m’avez-auſſi-demandé, Quels étaient les goûts que j’avais dans ma jeuneſſe, ét mes occupations, mon caractère, ét comme j’en-agiſſais avec mes Frères ét Sœurs, ſur-tout avec Edmond ? Je vais, ſi je puis, repondre à tout ça, pour avoir le plaisir de vous écrire plus-longtemps ; car il me-ſemble que je vous parle, en-vous écrivant ; ét j’ai-eu ſi-peu le temps de vous parler à a Auxerre, que je n’ai-pu repondre à la moitié des choses, Je vous dirai donc, que mes goûts ont-toujours-été audeſſus de ceux de nos Paysanes ; je n’aimais pas trop, ni leur mise, ni leurs occupations, ét je ſentais audedans de moi-même, que j’avais du goût pour quelque-chose de plus-diſtingué, dont pourtant je n’avais auqu’une connaiſſance. Mais ça-alait juſquelà, qu’un-jour, mon Frêre Edmond m’ayant-dit, qu’il avait-rêvé, que mon Père n’était pas ſon Pére, mais qu’il était fils d’un Duc, qui l’avait-mis chés nous en-penſſion, en-disant : — Gardez-moi ce Fils, ſans lui apprendre ce qu’il eſt, ét je viéndrai le chercher unjour -; Edmond, disais-je, m’ayant-conté ce