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bouche : car elle dit, qu’une pauvre Fille eſt deja-aſſés à-plaindre d’avoir-été-comme-ça attaquée par des Hommes ſi-fins, qui ont le deſſus d’elle, par leur âge ét leur experience, ét qu’il faudrait tout entendre ét tout voir pour la juger. Mais Moi, je ſuis unpeu plus-rigoureuse, je vous l’avoue, ma chère Madame ; il n’y-a experience ét fineſſe des Hommes qui y-tiénne ; on voit bién quand ils nous veulent attraper, ét ils ne nous attraperaient pas, ſi nous n’avions-un-tant-ſait-peu-envie d’être attrapées : ainſi je penſe au-ſujet de m.lle Manon, tout-comme vous, Madame, ét m.lle Tiénnette[1] ; mais je ſuis biénaise que ma Belleſœur penſe comme elle penſe, parce-que mon Frêre-aîné aura une bonne-famme, ét c’eſt ce qu’il faut ici. Et quant à mon Frère Edmond, je crais qu’il ne m’oublie pas auprès de vous, ét qu’il me-rappelle à votre ſouvenir, toutes les fois qu’il a le bonheur de vous parler à-part. Il était-jalous de moi, ét c’eſt moi qui la ſuis de lui ; à-present, qu’il vous voit tous les jours, ét que je ne vous vois plus ét je lui en-voudrai, ſi je le puis, ſ’il n’emploie pas tout pour me-redonner à Celle que lui ét moi nous regardons, comme notre Protectrice. Qu’eſt-ce qu’on veut apresent que je faſſe ici ? Enverité, j’y-mourrais plutôt fille, que de me-voir faire-la-cour, comme la font nos Patauds, même Ceux qui veulent faire les Polis.

  1. La Flateuse ! elle commence deja à-parler comme elle crait qu’on veut qu’elle parle.