Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/186

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je ne vous hais pas ; mais… — Accâblez-moi de reproches (a-t-elle-interrompu) ; je les merite, chèr Edmond : eſſaye ton pouvoir, abuse-s-en, ſi tu le veus, ét connais juſqu’ou peut aler mon amour. — M.r Parangon… — Il m’a-perdue, ét tu peus me-ſauver : Il eſt un monſtre à mes ïeus ; je ne le verrai jamais, — Vous m’avez-raillé ; vous m’avez-fait-porter un Billet… — Je ne desavoue rién… Chèr Amant, je n’étais-pas encore-changée ; ét cependant, ce n’était point par le motif qu’ont-pu me-prêter Celles qui t’ont-inſtruit (car je les devine). — Ah ! Manon, qu’il était-cruel d’être moi-même le porteur !… — Va, je te-vengerai de moi-même, comme de mon Complice. Apprens que l’indigne Suborneur crait continuer… après notre union ; qu’il m’aime ; que j’ai-tout-effacé dans ſon cœur, ét qu’il ne me-cède, que par un excès de tendreſſe : ce ſentiment, qu’il ne crayait-pas-fait pour lui, il l’éprouve, ét c’eſt la première-fois : je m’en-ſers pour le maîtriser, ét l’obliger à nous ſervir il le fait en-enrageant,… comme ces mechans Eſprits que la Puiſſance-divine force quelquefois d’obeïr aux Juſtes… Mon Ami, ſi tu ſavais comme ſ’opera ſon infame ſeduction, tu m’excuserais peutêtre unpeu… Il me-reſte un rayon-d’eſpoir… ſi tu le veus, tu peus me-rendre le cœur de ma Cousine ; elle ſerait desormais ma ſeule Amie ; je la verrais, ét jamais ſon Mari. — Ma chère Manon, il n’eſt plus d’eſperance ! vous me voyez-accâblé de