Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/180

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne ſont que la centième-partie des delices connues que les Fammes procurent : Il eſt ici des Jeunesgens qui ſont-contens dès qu’ils ſe-ſont-montrés, ét que les Belles de la Ville les ont-vus paſſer ét repaſſer à la promenade : ils ſavent que ce plaisir eſt reciproq, ét que Celles dont ils veulent-être-vus, desirent auſſi de voir ét de l’être : ſ’il arrive qu’ils ſaient-ſalués d’une jolie Femme, c’eſt une gloire qui gonfle leur cœur, ét le remplit le plus-agreablement du monde. La ſociété du beau-ſexe eſt ici charmante ; l’entretién des Fammes, ſeduisant ; leurs manières ont une aisance, une legèreté, tant de grâce, que le temps ſ’écoule auprès d’elles dans une continuelle ivreſſe. On dirait qu’elles ne ſont-faites que pour plaire, ét elles y-donnent tous leurs ſoins : cela nous flate, ét tu n’as pas-d’idée, mon Ami, des mouvemens qu’excitent dans notre cœur, le ſourire obligeant d’une jolie Perſone, un mot, un geſte-de-familiarité de-ſa-part devant une foule de Rivaus, ét mille autres choses que je tais, de-peur que cette matière ne ſait pas de ton goût.

Je reviéns à ton offre. Je t’en-remercie comme d’une preuve d’amitié ; mais je ne veus point en-profiter ; ne demande donc plus pour moi un retour qui ne me-rendrait pas heureus : je ne merite plus de vivre parmi vous : ét ſi tu m’aimes autant que toute ta conduite me l’a-prouvé juſquà ce jour, accorde-moi un dedommagement que je desire avec ardeur, emploie-toi pour qu’on me-rende Urſule :