Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/162

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plûs auſſi ; tâchez d’être longtemps avec moi : je n’aurais-connu qu’une ſeule Perſone pour me-ſervir, ſi l’on ne m’avait-donné que des ſujets de plaintes ordinaires… Vous êtes-aimable, Tiénnette ; je me-promets beaucoup de plaisir à vous avoir, ét je tâcherai qu’il ſoit reciproq-… Tant de raison ét de bonté me-penetra ; je pris une de ſes mains, je la baisai, mes larmes coulèrent. — Mais, ma Fille, me dit-elle, je ne fais que penſer ! ſerait-ce donc vous qui ſeriez… J’ai un preſentiment que vous êtes-digne de toute mon amitié : mais connaiſſons-nous auparavant toutes deux ; la prudence le demande. Elle me quitta, parcequ’il lui vint du monde. Et lorſqu’enſuite je fus ſeule avec elle, cette Famme incomparable, qui avait-entendu-parler de mon avanture, ét qui m’avait-à-demi-reconnue, ne me-fit pas une ſeule queſtion pour achever de ſ’inſtruire.

Quelques jours ſe-paſſèrent, ſans que m.r Parangon parût faire attention à moi. Ce calme apparent ne dura pas. Un-jour que Madame dinait chés ſa Tante-Canon, il vint me-trouver dans l’appartement de ſa Famme, Il employa d’abord les promeſſes les plus-ſeduisantes, ét des ofres avantageuses : enſuite il me-dit, que ſi je changeais ſon amour en-haîne, à-force de refus, je pourrais--bién m’en-repentir. Je repondis, que je ne craignais rién, en-fesant mon devoir. Depuis qu’il était-entré, j’avais-toujours-eu les ïeus ſur la porte, afin de m’eſquiver ; mais ſa po-