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attendant l’heure de ſe-mettre à table ; ét elle me-tendit la main, pour que je l’accompagnaſſe. Il commençait à faire-ſombre. Nous causames d’abord de choses indiferentes, en-marchant après avoir-parcouru quelques alées, m.lle Manon fut-ſ’aſſeoir ſur un banc de gason ; je me-mis à-côté d’elle, ét nous eumes cet entretién :

— Que le Ciel eſt-ſerein ! cette automne eſt la plus-belle que j’aie-encore-vue, — Oui, mademoiselle, il fait le plus-beau-temps du monde. — Il ſemble que les étoiles aient une lumière plus-étincelante ét plus-vive qu’à-l’ordinaire ? — Oui, mademoiselle. — Oui, mademoiselle ?… Mais ſavez-vous, Edmond, que vous ne repondez pas bién, ét que je quêtais un compliment ? eſt-ce que vous n’en-ſavez pas faire ? — Pardonnez, mademoiselle ! par-exemple lorſque vous m’avez-parlé de la beauté des étoiles, il m’eſt-venu en-penſée de vous dire… — De me-dire ?… Hébién ? quoidonc ? — Que le feu de vos ïeus eſt plus-vif que le feu dont elles brillent. — Enverité, vous l’avez-penſé ? — Oui, mademoiselle, ét je n’osais le dire. — Mais cela ſe-dit, ſurtout dans un tête-à-tête ; cela ſe-dit ſans difficulté… (Et me-parlant bas :) Il eſt bién d’autres choses, lorſqu’on eſt ſans Temoins, qu’on peut ſe-dire encore !… Je voudrais être votre Confidente ! Voyons ; communiquons-nous nos petits ſecrets ? mais point de réserve ; je n’en veus point avoir pour