Page:Rétif de La Bretonne - L’Anti-Justine ou les délices de l’amour, 1864.djvu/75

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 57 —

Montencon était connu de Conquette, dont il avait foutu la mère avant la vérole ; il n’en avait que plus d’envie de le mettre à la fille ; je le trouvai dans l’escalier en arrivant moi-même. Je l’introduisis ; il demeura immobile de joie et d’admiration en voyant une femme si belle… J’avais à faire ; je ne restai qu’un moment en lui disant que je lui laissais ma fille pour compagnie. Il balbutia en me reconduisant : « Elle est ravissante ; quel goût dans sa parure ! comme elle est chaussée ! quel dommage qu’un Vitnègre ait eu ce pucelage-là !… — Vitnègre ?… elle est pucelle !… — Oh ! mon ami, puis-je y aller et tâcher de mettre au moins une corne à ce gredin-là ? — Fais ce que tu pourras, mais je doute du succès avec ton poil gris. Il n’y a que les catins blasées qui souffrent les barbons vigoureux et libertins ; avec les pucelles sages, il faut être tendre, et tu as la figure d’un satyre ou d’un réprouvé ; mais tentes-y. »

Après mon départ, Montencon essaya d’abord de la galanterie… mais n’y gagnant rien, il culbuta Conquette à l’improviste sur le foutoir, et comme il était vigoureux, il lui approcha, en la contenant d’une main, le vit des lèvres du con. Cependant, il ne put l’enfiler ; un coup de cul en arrière le débusquait ; il allait la menacer de la poignarder, lorsque je rentrai. Conquette se rajusta sans marquer d’humeur ; je dis tout bas à Montencon : « Le pucelage ? — C’est un diable, j’en serai réduit à me branler… — Tu la foutras… »

Nous nous mîmes à table ; Conquette parla comme à l’ordinaire à Montencon et rit même avec lui tout