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Jésus ! que mes hauts talons, qui me prêtent tant de grâce et font bander tant de monde, ne me donnent jamais de cors aux pieds, mais que ces pieds tentatifs et toujours foutatifs restent longtemps comme ils sont ! »

« Amen ! amen ! » s’écria toute la société, vits et cons.

Tout le monde sortit édifié de la piété éclairée de ma fille, et en s’en allant on disait : « Voilà ce que c’est que de connaître la vraie religion de la nature et prier la divinité comme il convient, en lui demandant des choses raisonnables… Oh ! c’est une fille exemplaire ! »




CHAPITRE XLVI.

Première négociation du con de ma fille.

Le surlendemain, quand je vis Conquette (que j’avais évitée le lundi), je la trouvai coiffée en battant-l’œil, ce qui, avec ses grands yeux à longs cils, la rendait charmante ; elle avait des souliers de coutil de soie neufs qu’elle essayait. Je me jetai à ses genoux en lui disant : « Conquette, ton pied est le mieux fait possible, mais il est un peu grand, et ce soulier fort pointu, ces talons minces trop élevés, le font paraître plus petit de moitié. Qu’il est divin !… et je bande, comme tu le vois… — Mon cher papa, comme je sais à quel point vous m’adorez, j’ai voulu consacrer cette chaussure avant de vous la prêter pour orner votre cheminée. Voici les blancs