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LE RÉPERTOIRE NATIONAL.


        Crains de rallumer sa colère,
        Les pleurs blessent l’œil du tyran ;
        Il hait le cri de la misère
        Qu’arrache un joug intolérant.

        En proie aux étrangers perfides,
        Gémissent tes fières cités.
        Vois briller dans leurs mains avides
        Les fruits de tes champs dévastés.

        Pleure, ô Pologne abandonnée !
        L’espoir a déserté ton cœur,
        Et la cruelle destinée
        Comble ta coupe de douleur.

IV.


Le Sarmate chantait, ainsi, dans son délire,
L’hymne de la douleur résonnait sur sa lyre.
De ses tristes pensers, en vain, troublant le cours,
Les maux de son pays le poursuivaient toujours.
Ah ! si l’astre des cieux, des portes de l’aurore,
Revoyait au château, sur les lambris qu’il dore,
Ces armes autrefois fatales au tyran,
Que mes aïeux baignaient dans le sang ottoman,
J’y trouverais écrit par la main d’un autre âge :
Tout pour notre patrie et mort à l’esclavage.
Mais l’orage a détruit ces restes glorieux,
Sous Praga s’est brisé le fer de nos aïeux.
Hélas ! ce jour fatal vit tomber ma patrie !
À peine arrache-t-elle une larme attendrie
Au Polonais courbé sous le poids de ses fers ;
Comme au mourant pour lui ce nom n’est plus qu’un songe
Qu’un espoir mensonger alimente et prolonge,
        Semblable au mirage des déserts.

V.


Mais quel chant glorieux vient frapper mon oreille ?
Ah non !… mon cœur s’est trop nourri d’illusions…
Cependant, je la vois, la Pologne s’éveille,
        J’entends partout retentir les clairons.

L’ange terrestre a dit : Warsaw, brise ta chaîne.
Devant nos fers vengeurs s’est enfui le tyran ;
        Et les débris de son sceptre insolent
Surnagent dans le sang des guerriers de l’Ukraine.