Page:Répertoire national ou Recueil de littérature canadienne, compilé par J Huston, vol 1, 1848.djvu/261

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
253
LE RÉPERTOIRE NATIONAL.
le canadien.

Loin de nous un pareil transport :
Le soupçon même nous outrage ;
Si tu nous vois souffrir la mort,
N’accuse pas notre courage.
Le moment où la nation
Doit triompher bientôt s’avance ;
Voici venir l’élection !…
C’est là notre seule espérance.


1834.

LE PONT DE PIERRE.

Au déclin d’un beau jour du mois de septembre, je quittai le Cap-Santé, charmant village situé à environ douze lieues de la ville de Québec, et gagnai la forêt en arrière, déterminé, malgré la débilité de mes vieilles jambes, d’aller contempler une grande curiosité de la nature qui se trouve à quelques jours de marche de ce village. Ni les instances de mes amis, ni les prières de ma famille, qui tous me représentaient les fatigues, les privations et la misère qu’il me fallait essuyer dans ce voyage, ne purent me dissuader de mon projet. J’étais bien muni de provisions ; je n’avais pas non plus oublié le tabac à pipe, quoique Aristote dise que tout tabac est nuisible à la santé. J’avais pris au Cap-Santé deux hommes qui devaient me piloter dans cette expédition. L’un, quoiqu’arrivé à l’automne de son âge, conservait encore toute cette vigueur qui accompagne d’ordinaire jusqu’à la fin une vie active et laborieuse ; et l’autre jeune et robuste passait pour le plus capable du village. Ils étaient tous deux renommés pour leurs longues excursions dans les bois et joignaient à beaucoup de bon sens, à des manières civiles et déférentes, cette aimable gaité si caractéristique de nos heureux paysans. Après une marche de quelques heures nous nous arrêtâmes, jugeant qu’il était temps de dresser notre cabane pour la nuit. Nous eûmes bien vite abattu ce