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LE RÉPERTOIRE NATIONAL.

la paix, et tous d’une voix unanime adoptent son avis. Le poète, après un beau portrait de Belzébuth, lui fait prononcer un assez long discours, qui tend à faire attaquer, par force ou par adresse, le monde des humains. Son conseil est approuvé et reçu avec enthousiasme ; et les applaudissements rendant Belzébuth plus orgueilleux, il prend la parole sur un ton plus fier et plus élevé ; il discute sur le choix de celui qui sera chargé d’aller à la recherche du monde terrestre. Satan parle, et prend sur lui d’aller chercher le globe sur lequel il fonde ses projets de vengeance. Son discours fini, il rompt la séance. Par son ordre l’arrêt est publié au son de trompe, et l’armée y répond par de grands cris. Dans le cours du récit, on nous parle de combattants qu’on voit s’entrechoquer dans le firmament, présage de guerre ; ce qui nous fait croire que Milton, en cette occasion comme en plusieurs autres, ressent l’effet des préjugés superstitieux des temps où il a vécu.

Nous voyons de plus que les démons, sans s’amuser à souffrir les tourments imposés par l’Être Suprême, prennent des divertissements ; les uns font des concerts en orchestre, mariant leurs voix aux sons des instruments ; d’autres n’étant point sensibles à l’harmonie musicale, se distraient en faisant usage de la dialectique ; on en voit d’autres qui, préférant la promenade aux autres amusements, font des voyages de plaisir le long du Styx, du Cocyte, du Phlégéton, du Léthé, de l’Achéron ; et s’ils n’y naviguent pas, c’est probablement parce qu’ils n’avaient point de canots, et n’en savaient point faire, par la raison que Milton ne connaissait pas un canot sauvage du Canada. Mais nous ne voyons pas dans la théologie qu’il y ait jamais eu des fleuves en enfer, et Dieu n’en avait certainement pas créé pour raffraichir les démons.

Satan se trouve dans le même cas que Jupiter, en ce que sa tête enfante un ange féminin. Vient ensuite un conte immoral d’une hardiesse inconcevable, et qui dégoûte également le métaphysicien, le théologien et le philosophe. Nous