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LE RÉPERTOIRE NATIONAL.


Lui demande un minot ou de bled ou de pois.
« Oui, dit l’autre, pourvu que tu m’en rendes trois.
Que dis-je, trois ! c’est peu, tu m’en remettras quatre.
— Quatre pour un ! bon dieu ! — Je n’en puis rien rabattre :
Il est, je crois, permis de gagner sur un prêt. »
Oui, mais quatre pour un, c’est un fort intérêt.
Que fera l’homme pauvre ? Il n’a pas une obole :
Il prend le grain du riche, et lui vend sa parole.
En proie à la misère, à la perplexité,
Il sème, en maudissant l’avide dureté
Du richard qui lui tient le couteau sur la gorge,
Pour un ou deux boisseaux de bled, de seigle ou d’orge.
Se laisser follement périr contre son bien ;
Manger le bien d’autrui pour conserver le sien ;
Sont deux cas différents : l’un n’est que ridicule,
Mais l’autre est criminel, et veut de la férule :
L’un fait tort à soi-même, et l’autre à son prochain.
On n’est pas scélérat quand on n’est que vilain :
Il faut garder en tout une juste mesure,
Et surtout distinguer l’intérêt de l’usure.
Le vilain est un fou qui fait rire de soi ;
L’usurier, un méchant qui viole la loi.
C’est donc sur ce dernier qu’il faut faire main basse,
Jamais cet homme-là ne mérita de grâce.
Cet être des humains trouble l’ordre et la paix :
Par lui le pauvre est pauvre, et doit l’être à jamais.
Il fut, à mon avis, ménagé par Molière ;
Boileau n’en parle pas d’un ton assez sévère :
Est-ce par de bons mots qu’on corrige ces gens ?
Il leur faut du bâton, ou du fouet sur les flancs.
Mais je vois à son air que ma muse se fâche,
Je lui ferme la bouche, et je finis ma tâche.

M. Bibaud.



1818.

SATIRE CONTRE L’ENVIE.


Mal ou bien, mon début fut contre l’avarice.
Cheminant, l’autre jour, je rencontre Fabrice,
La canne sous le bras, un pamphlet à la main :
« L’avez-vous lu, dit-il. — « Quoi ? — Ce dur Chapelain…