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comme elle. Elles se rendaient à l’invitation ; on buvait, on mangeait, on se couchait et on dormait comme de simples mortels[1]. Le Tao-sse osa même venir dans la ville, et par un prestige qui trompa beaucoup de monde, y faire paraître une ville d’or. La populace était dans le plus grand enthousiasme. Le roi de Chou ayant appris tous ces désordres, ordonna d’arrêter le Tao-sse. Pendant un mois, on ne put le trouver, parce qu’usant d’un nouveau sortilège, il avait arrosé la terre autour de lui avec du sang de chien ; mais toutes ses ressources ne purent le sauver ; il fut enfin saisi et coupé en morceaux. L’ordonnance qui parut à ce sujet était conçue en ces termes : Être pieux envers ses parens, bon frère, droit et fidèle, pur dans ses actions, observateur scrupuleux des lois et attentif à toutes ses pensées, voilà ce qui constitue une bonne doctrine. Toutes les fois qu’on s’applique à la magie, on ne cherche qu’à séduire les hommes. Hélas ! celui qui par de fausses doctrines trompe la multitude, n’est-il pas digne de dix mille morts ? Les malheureux abusés laissent sortir de leurs maisons leurs femmes et leurs filles ; elles vont dans les temples brûler des parfums ; elles suivent les avis d’un docteur pervers, qui cherche à les faire tomber dans la

  1. Ien, chi, thsin, tchhou, iu seng jin wou i.

    L’expression chinoise a quelque chose de piquant. Wou i, sans aucune différence, signifie aussi que tout cela se passait sans qu’il y eût aucun miracle.