Contre sa prudence habituelle, il avait cédé pour une fois au plaisir de faire un bon conte et de divertir le milord, en même temps que de lui donner une haute idée de son adresse et de son esprit. Il n’était pas fâché non plus de mettre en valeur la force des charmes d’Olympia, puisqu’il paraissait évident que c’était par amour pour elle que le seigneur français subissait depuis plus de cinq années les diverses servitudes dont aucune ne décourageait sa curieuse obstination à les préférer toutes plutôt que de renoncer à une habitude d’autant plus surprenante que les causes en demeuraient obscures et secrètes pour tous ceux qui ignoraient les circonstances de la vie de M. de Galandot et comment le passé s’en reliait par un nœud subtil et inattendu à l’inexplicable présent. Qui eût pensé que le pauvre gentilhomme servait, en une double maîtresse, le fantôme d’un amour unique et deux fois vain. Angiolino ne voyait là qu’un beau trait de singularité et une belle figure d’extravagance. Aussi mit-il tous ses soins à sa narration, l’agrémenta de pantalonnades et de bouffonneries propres à dilater la rate du milord.
Son récit terminé, il s’attendait donc à voir M. Tobyson éclater d’un de ces accès de rire qui lui faisaient, en une bouffée, monter au visage toutes les couleurs de l’apoplexie future et secouaient sa gigantesque personne d’un orage de gaieté. D’ordinaire M. Tobyson ayant ri devenait fort généreux, étant de son naturel hypochondre, et le moment était alors favorable pour qu’Olympia obtînt de lui quelqu’une des belles et précieuses