108 PORTRAITS ET SOUVENIRS
quelques-unes des aspirations les plus profondes.
D’ailleurs, l’accord s’est fait, depuis longtemps
déjà, sur son nom. Tout le monde sait que Moréas
a laissé quelques vers admirables, dus à un génie
minutieux et patient, très subtil et très volontaire.
De cette patience et de cette volonté, les Réflexions sur quelques Poètes nous apportent un
témoignage indirect, mais précieux. Dès ses débuts,
Moréas se montra un écrivain méticuleux et attentif. Certaines bizarreries que l’on peut relever dans
les Cantilènes n’ont rien d’aventuré, pas plus que
certains pédantismes que nous pouvons noter dans
le Pèlerin passionné. Moréas ne hasarde jamais
aucune audace qu’à bon escient. Son classicisme
est aussi raisonné que son symbolisme. Très
adroit, très avisé, d’imagination brillante mais peu
inventive, Moréas eut toujours le souci de chercher des points d’appui à son inspiration. Nul n’a
des sources plus visibles que ne le sont les siennes.
Aussi l’ai-je toujours connu grand lecteur de poètes et surtout de nos vieux poètes français, qu’il
possédait bien et qu’il avait pénétrés à fond.
Cette fréquentation quotidienne des poètes,
Moréas la pratiqua durant toute sa vie. Il y fut aidé
parla préoccupation exclusive où il vivait de son art.
N’étant pas très producteur il satisfaisait son goût
des vers avec ceux d’autrui et s’en assimilait la
substance. C’est de cette docte habitude que sont