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d’une façon et avec une ardeur que toutes n’inspirent pas. Ah ! monsieur, est-il donc si commun que nous pensions ainsi ? Je crois, pour tout de bon, que nous sommes plus délicates sur ce point que les hommes ne se l’imaginent. Nous croyez-vous soucieuses de ces grands transports dont plusieurs d’entre nous tirent peut-être plus de vanité que d’agrément. Notre corps est tendre et fragile, monsieur. Aime-t-il, autant qu’on le prétend, être ébranlé en toute sa nature par un assaut qui souvent le fatigue plus qu’il ne le charme ? N’y a-t-il pas dans la violence des hommes quelque chose que nous subissons plus que nous ne le goûtons. Cet effort furieux et renouvelé nous étonne au moins autant qu’il nous amuse, et je sais plus d’une femme qui préférerait à ces témoignages un peu grossiers des attentions plus ménagées, de ces caresses plus discrètes qui nous troublent et nous émeuvent davantage que ces certitudes que vous vous empressez tant de nous proposer. Aussi, ai-je pensé souvent que l’amour était tout autre chose que ce que vous en avez fait, et je veux bien vous dire, monsieur, ce que j’imagine volontiers qu’il devrait être.

Madame de Blionne baissa les yeux et reprit à voix