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cristal : elle s’y rapetissait en miniature, guérie de ce qu’elle avait eu là-bas de trop pathétique, réduite là à un aspect glaciaire et minéralisé.

C’était l’heure où Eustase sortait chaque jour pour visiter Humbeline. Elle séjournait, alternativement et d’après le temps de l’année, dans son jardin ou le salon. Le salon grand comme un jardin et le jardin petit comme un salon se ressemblaient. La douce pelouse se veloutait en tapis. L’eau du bassin se reproduisait clarifiée dans les glaces du boudoir, et les tentures représentaient en arabesques intérieures l’ombre des feuilles, au dehors, sur les murs du cottage.

Chaque jour Eustase y allait comme la veille, et le charme de la conversation qui se tenait entre la jeune femme et le philosophe était dû à l’échange loyal qu’ils faisaient entre eux de la réciproque utilité où ils s’étaient l’un à l’autre. Humbeline dispensait Eustase de se mêler à la vie. Les aspects s’en trouvaient, pour lui, résumés en l’instructive Dame avec ce qu’ils ont de contradictoire et de divers. Cette délicate personne était à elle seule d’un tumulte exquis. Toute l’incohérence des passions existait en ses goûts réduits à une dimension minuscule et à un