semblable et, loin de souffrir des nasardes que leurs rôles leur imposaient, ils tiraient vanité des rires qu’ils provoquaient, tandis que ces rires m’infligeaient un véritable supplice. Non seulement ils me persécutaient sur le tréteau, mais j’étais encore persuadé qu’ils me poursuivaient dans la rue. Je m’y sentais victime d’une dérision perpétuelle et j’y gardais l’impression d’être partout et pour tous un personnage ridicule. Bientôt mon caractère participa de cette méfiance où je vivais. Ce souci s’ajouta aux chagrins qui me tourmentaient déjà et je devins taciturne et hypocondre.
J’avais tort assurément, car, mis à part les inconvénients qu’elle comportait, ma situation n’était pas mauvaise. Les gages que m’allouait le signore Capagnole suffisaient largement à mon entretien. Sans être un acteur renommé, j’étais devenu assez vite un comédien apprécié. L’existence que je menais avec notre troupe n’avait rien dont, en