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vieillit, ce qui ne l’empêche pas de conserver la plus comique tête de Scapin raisonnable que l’on puisse voir.


11 janvier. — Je suis allé prendre des nouvelles de M. Feller. Il est souffrant depuis le jour de l’enterrement du baron Dumont. Il a de la bronchite et doit garder la chambre pendant quelque temps. J’ai su cela par un petit mot de lui. Malgré sa toux, il m’a reçu.

Avouerai-je que je ne pénètre jamais dans l’appartement de M. Feller sans une surprise renouvelée ? Il habite un logis qui est si peu en rapport avec celui que nous supposerions à un savant de sa qualité ! Avant d’y être entré, je l’imaginais rempli de livres, orné d’antiquités, pourvu de médailliers, comme il convient à la demeure d’un numismate, ou bien encore muni d’un respectable mobilier d’acajou. J’aurais aussi, volontiers, supposé Feller vivant dans un bric-à-brac à la Hoffmann. Quelle ne fut donc pas ma surprise, à ma première visite rue de Condé, quand Feller m’accueillit dans le plus coquet appartement que pût souhaiter petite-maîtresse ou vieille coquette !

Dans cette grave maison, d’aspect sévère et quelque peu délabré, M. Feller occupe une série de petites pièces d’entresol, basses de plafond, toutes tendues de soies claires et meublées dans un rococo saugrenu et charmant. On croirait qu’il ait