Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/271

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de l’antiquité en compagnie d’un homme compétent et informé ! De quelles galanteries saugrenues a-t-il su assaisonner cette promenade à Pompéi, où nous avons eu la chance, Mme  de Lérins et moi, de pouvoir nous isoler. Il est vrai qu’au retour il nous a fallu subir les madrigaux qu’il prodiguait et qu’il accompagnait de son rire aigu et satisfait.


Nous sommes retournés plusieurs fois au Musée, Mme  de Lérins et moi. Nous aimions errer parmi ce peuple de statues, mais toujours, invinciblement, nous revenions à la salle des bronzes. Par leur matière souterraine et brillante, ils nous charmaient, en même temps qu’ils nous fascinaient par le rythme de leur mouvement. La dernière fois où nous vînmes admirer la nocturne beauté de ces héros de métal, nous avions encore les yeux enivrés de leurs formes sombres, quand, en traversant une des galeries, nous fûmes attirés par la clarté d’une fenêtre ouverte. Elle donnait sur une cour violemment ensoleillée, fermée par un haut mur. Il y avait dans cette cour des débris de sculptures, des fragments de statues, et, au pied du mur, une rangée de grandes jarres en terre cuite, rouge et jaune. Bombées, pansues, on eût dit d’énormes fruits ou des œufs monstrueux. Et ce vieux mur, ces jarres d’argile gonflées au soleil me donnaient tout à coup, au sortir de ce réel et pur monde grec dont nous venions de quitter les nobles et solides fantômes de