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Laure, je suis contente de t’avoir revue. Reviens quelquefois écouter les conseils de ta vieille tante… » Et elle ajouta : « Cela vaudrait mieux que de trop voir Madeleine de Jersainville. On dit qu’elle est un peu coquette… »

Madeleine, un peu coquette ! Ne trouvez-vous pas délicieux, mon cher Jérôme, l’euphémisme. Enfin, comme vous voyez, ma visite s’est fort bien passée, si bien même que, quelques jours après, j’ai reçu une lettre de ma tante, me mandant que la mère supérieure espérait que, malgré les difficultés de ma position, les bonnes relations ne cesseraient pas entre le couvent et moi. Elle ne doutait pas non plus que, l’occasion se présentant, je ne consentisse à m’associer à certaines œuvres patronnées par la communauté. Ces aimables paroles sont un indice que la lettre de quête n’est pas loin ! Heureusement, mon cher Jérôme, votre libéralité m’a mise à même de satisfaire largement à ces menues obligations. Elle m’a permis aussi de m’offrir un petit bijou que j’avais vu, rue de la Paix, lors de l’une de mes premières promenades et auquel j’avais souvent pensé depuis. C’est un cœur, formé de pierres sans valeur, mais délicieusement montées. Quand je l’ai suspendu à mon cou, il m’a semblé que Paris lui-même me l’offrait en signe de bienvenue. Ne vous offusquez pas de ces galanteries de la grande ville. Tant que je n’écouterai que celles-là, la mère Véronique peut dormir sur ses deux oreilles. À propos, à quand votre « remariage » ? On dirait que vous me regrettez.

Votre amie,

Laure de Lérins.