fût plus heureux. Comme elle craignait de se trahir, sitôt de retour à l’hôtel elle regagna sa chambre, s’y enferma, prétextant une migraine.
Sa vengeance fut parfaite autant que magnanime. Elle se cacha comme il s’était caché. Elle prit garde, le lendemain, de ne monter à l’abbaye que lorsqu’il fut parti. Elle se plaça dans la chapelle à quelques rangs derrière lui et ce fut seulement lorsqu’ils se relevèrent tous deux de la table de communion, où quelques personnes les séparaient qu’il la vit soudain près de lui, les mains jointes. Il la surprit comme elle l’avait surpris, dans le même acte solennel, pas mieux préparé qu’elle à cette découverte. Mais là où elle n’avait éprouvé que révolte, indignation, amertume, pénétré de bonheur, la remercia d’un regard rapide. Il avait encore l’hostie dans la bouche et, si forte que fût la commotion reçue, il parvint à se dominer. Les yeux baissés, il regagna son banc où elle le suivit et s’agenouilla près de lui. Ils s’abîmèrent dans la prière. Les sonnettes, tintant doucement d’un bout à l’autre de l’église, leur rappelaient seules le lieu où ils étaient. Michel, prenant la main d’Adélaïde l’appuya sur son visage, la recouvrit des siennes. Elle sentit qu’il pleurait. Alors, elle fut saisie d’une émotion si suave qu’elle la confondit avec la grâce. Cet amour infiniment pur, mais humain, qui la comblait d’une manière subite, admirable lui parut un signe manifeste de la présence divine. Elle s’émerveilla qu’un pauvre acte d’humilité lui fût ainsi payé par la plénitude de la foi, par de tels délices. Elle se sentait semblable aux saints, semblable aux anges, portée, roulée dans la paix comme dans