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l’abbaye d’évolayne

— Justement, j’aime !… murmura-t-il très bas. Voyez-vous, Dieu n’est une vague entité du moment qu’on croit en Lui, c’est un être qu’on aime et l’on ne peut supporter qu’il ne soit rien pour les autres.

— J’aurais compris, soupira-t-elle.

— Hélas ! vous voyez bien que non et sachant quelles étaient vos dispositions…

— Encore une fois pourquoi avez-vous choisi ce prêtre pour vous les révéler ?

— Comprenez-moi, Adé. Du moment qu’on accepte la religion, on l’accepte tout entière, on admet l’autorité du prêtre et sa compétence, due aux grâces spéciales attachées à son ministère. Votre cœur, oui, je le connais. Mais pour pénétrer au plus intime de votre conscience, pour comprendre votre position exacte en matière religieuse, le père était plus qualifié que moi, c’est pourquoi j’ai voulu qu’il vous interrogeât.

— Ah ! s’écria-t-elle frémissante, qu’est-ce que ces subtilités ? Mon âme n’était pas pour vous un château fort, avec de mystérieuses retraites aux serrures secrètes, mais une maison toute claire dont vous pouviez à votre gré ouvrir les portes. Il n’y avait besoin de personne pour en forcer une… mais à quoi bon vous expliquer ce qu’est la parfaite confiance.

Ils étaient arrivés devant la gare. Au lieu de se diriger vers l’hôtel, Adélaïde, tournant à droite, s’engagea dans la grande route de la vallée que surmontaient des bois touffus. Michel voulut la suivre, elle l’arrêta :

— Je vous prie de me laisser, dit-elle, j’ai maintenant besoin d’être seule.