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l’abbaye d’évolayne

fond de la nef latérale, une chapelle, plus grande que les autres, surélevée de quelques marches, était réservée aux fidèles qui désiraient prendre part au Saint Sacrifice. Une dizaine de femmes, quelques hommes occupaient les bancs peu nombreux et Adélaïde reconnut de loin la haute silhouette de Michel. Elle ne voulut pas le rejoindre, s’agenouilla au bas des marches dont le transept la séparait. Elle pouvait voir, se tournant de côté et d’autre, plusieurs autels. Les messes ne se célébraient pas toutes en même temps. Là, un moine, rabattant sur sa tête l’antique capuchon blanc, quittait une chapelle où, bientôt, une silhouette exactement semblable pénétrait à son tour. Ici, un religieux, les bras étendus, disait la préface, un autre, penché sur la pierre consacrée, consommait son Dieu. Ils n’officiaient point avec la hâte des prêtres de paroisse ; lentement, chaque prière montait du plus profond du cœur jusqu’aux lèvres qui remuaient à peine. Leurs visages clos semblaient ceux d’hommes endormis. Leurs yeux ne s’ouvraient que pour lire sur le livre sacré le propre du temps et se refermaient vite, refusant toute image extérieure, À côté d’eux les servants : novices qui ne consacraient pas encore, convers qui n’opéreraient jamais le miracle de la transsubstantiation, s’empressaient, assistaient avec un respect profond le célébrant, le père, muni de pouvoirs infinis. Et des quatorze chapelles réparties dans l’immense édifice, les sonnettes tintaient, se répondaient, les hosties s’élevaient à des intervalles inégaux, à droite, à gauche. Le sacrifice offert pour le rachat du monde ne cessait pas. L’atmosphère était prodigieuse, Adélaïde la subit docile-