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l’abbaye d’évolayne

qu’il l’avait quittée. D’où venaient dans ses yeux cette paix et cette peine ? Quelle offense avait-il à lui reprocher pour la regarder, tandis qu’elle répondait à ses questions, avec cette expression d’indulgence triste et de pardon ? À son tour elle interrogea :

— Quelles sont vos impressions ?

— Très bonnes, dit-il brièvement, et il semblait décidé à ne donner aucun détail sur sa retraite.

Elle insista :

— Pas trop dure au point de vue physique, cette vie monacale ?

— Le corps s’y fait vite. On respire une atmosphère de plénitude qui soutient.

— Je comprends, dit-elle. La chimère de ces hommes est belle !

Il parut trouver sa remarque impertinente et répliqua avec une certaine sévérité :

— C’est vraiment trop facile de traiter de chimère tout ce qui vous dépasse.

Sans doute, vivant avec les moines et voyant de près leur bonheur avait-il ressenti la même impression d’admiration, d’envie, éprouvée par Adélaïde devant le père Athanase. Mais il n’était point homme à subir comme elle ses émotions, sans leur chercher un sens et une justification. Il voulait démêler cette part de vérité évidente enclose dans toute noble erreur. Elle pensa que, plus tard, quand ils seraient très vieux, s’ils n’avaient rien trouvé de mieux, ils accepteraient peut-être tous deux de mourir dans la religion catholique, par horreur de la négation absolue.

Elle ne s’étonna donc point que Michel étudiât