savez bien, j’ai dans ce cloître un ancien condisciple, mon très cher ami de jeunesse, Henri Darbaud, en religion dom Athanase.
Entre toutes les lettres de félicitations reçues lors de leur mariage, Adélaïde évoqua soudain la plus marquante : celle qui pour en tête avait une croix et le mot « Pax » et dont le ton était tour à tour si enjoué et si austère. Une phrase lui revint à la mémoire, où le religieux, en bénissant les jeunes époux, leur souhaitait de nombreux enfants. Ce souvenir la fit rougir. Après sept ans de mariage, elle avait perdu tout espoir de maternité. Elle le regrettait plus encore pour son mari que pour elle. Elle avait souvent l’impression qu’elle ne lui suffisait pas absolument et que des enfants eussent sans doute comblé ce vide qu’elle sentait entre eux. À la dérobée, son regard pesa un instant sur Michel. Connaîtrait-elle jamais bien ce cœur caché ? En même temps elle répondit, avec un léger accent de persiflage :
— Dom Athanase ! Mon Dieu ! de quel gouffre d’oubli émerge-t-il soudain à la surface de vos affections ? Vous l’avez quelque peu perdu de vue, il me semble.
Michel se reconnut coupable. Par paresse et manque de temps, il n’écrivait guère et laissait depuis des années sans réponse la dernière lettre du religieux. Mais il prétendit que leur amitié n’avait, de ce fait, subi aucune atteinte. Il exprima le désir de réparer ses négligences en allant surprendre le moine dans son couvent. On devait pouvoir trouver un hôtel près de cette abbaye et s’y arrêter. Adélaïde, s’avisant que la présence d’un ami retiendrait peut-être quelque temps