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l’abbaye d’évolayne

fortune à son frère qui la gardait dans un coffre avec la sienne propre. Les revenus de sept années, capitalisés, lui constituaient une réserve importante, dont elle pouvait user pour se soigner dans les meilleures conditions. Dès qu’elle fut assez forte pour voyager, Maurice Verdon l’engagea à gagner un climat plus doux. Elle se prépara donc au départ

À plusieurs reprises, elle avait reçu des lettres de la mère Hermengarde auxquelles elle ne répondit pas. Elle fit promettre à son frère de ne jamais donner son adresse à Michel, si celui-ci s’inquiétait un jour de ce qu’elle était devenue. Elle voulait qu’entre eux toute communication fût impossible. Elle avait besoin d’échapper à toute influence, d’être seule avec son âme pour examiner en paix ce qu’elle pouvait faire de sa vie détruite. Sur ce point, Maurice l’approuvait pleinement. Il désirait la voir oublier au plus vite l’homme qu’elle avait la faiblesse d’aimer encore. Il ne prenait au tragique nulle peine, ne croyait nul regret éternel. Adélaïde était toujours belle. Il pensait qu’un nouvel amour s’offrirait bientôt à elle, l’arracherait à ses obsessions religieuses. Alors elle se remarierait sans doute ou prendrait un amant. Déjà, sans le lui dire, il la confiait aux forces irrésistibles de la vie qui lui rendrait peu à peu, croyait-il, l’appétit du bonheur.

Au début du printemps Adélaïde s’installa à Arcachon. Et, tout de suite, la nature la reprit avec tant de force qu’elle ne put durant longtemps s’appesantir sur aucune pensée. Nul sentiment ne subsistait en elle que celui de sa liberté. Et la première phrase qui lui revint à la mémoire fut celle