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en France


être les plus anciens monuments de la satire ; Homère en présente encore des exemples dans la peinture qu’il fait de la démarche inégale de Vulcain, et dans celle de l’impertinente loquacité de Thersite. La plupart des ouvrages des poëtes lyriques avoient un caractère qui les rapproche de ce que nous entendons par satire. Archiloque, Hypponax, lancèrent contre leurs ennemis des traits si piquants qu’ils les firent mourir de désespoir, Stésichore perdit la vue en punition des vers mordants qu’il avait faits contre Hélène. Alcée déchira dans ses vers Pittacus et les tyrans de Lesbos. Parmi les fragments qui nous ont été conservés des ouvrages de Siraonide, on remarque une satire violente contre les femmes, dont il compare les divers caractères avec les mauvaises inclinations de certains animaux. Théocrite commence son idylle intitulée les Grâces ou Hiéron par une diatribe contre les princes peu généreux envers les poëtes.

Les auteurs tragiques eux-mêmes ont souvent donné dans leurs ouvrages un libre cours a leur verve satirique, et VHippolyte couronné d’Euripide ofFre des passages entiers qui ne sont que des satires absolument parlant, puisqu’elles ralentissent l’action. Le chœur des tragédies est presque toujours satirique.

La vie entière de Diogène est une satire continuelle. La manière d’argumenter de Socrate avec ses disciples prouveroit seule que ce genre d’esprit, qui anime ce que nous appelons satire aujourd’hui, n’étoit pas inconnu aux Grecs, quand môme les dialogues de Platon ne nous offriroient pas des modèles en ce genre. On sait que ce dernier philosophe, qui avoit banni Homère de sa république, faisoit ses délices de la lecture des ouvrages