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ÉPISODES


Puis vint l’époque de désastres et de mort
Le temps de désarrois et d’adverse Fortune
Où la déroute hurle aux clairons qu’elle mord !

L’effarement cabré des étalons sans brides,
Traînant les coffres pleins où sonne le trésor
Des Rois rués de peur à des fuites livides,

Dressé jusqu’au niveau de mon front l’a couvert
D’écumes et de sang jaillit d’entre les vides
De la foule dont leurs sabots broyaient la chair.

Cette rosée a fait mes deux lèvres plus roses
Où riait le méchant rire cruel et clair
De tout l’ennui bâillé dans mes gardes moroses ;

Et la poussière humaine a terni l’émail dur
De mes yeux qui scrutaient le spectacle des choses
Miré dans la clarté calme de leur azur ;

Et le vieux Pont tendu de l’une à l’autre rive
Ainsi qu’une guirlande où pend un fruit trop mûr,
Se rompit sous le poids de la tourbe hâtive ;